Notre collègue et ami Michel Havard, est décédé subitement le 12 mai 2020 à Bamako où il était affecté.

Le Cirad et l’Afrique sont en deuil car nous perdons tous un grand Monsieur tant dévoué pour nos partenaires et ses collègues. Et la science, elle, perd un chercheur de terrain aux capacités de diagnostic et d’innovateur hors pair. Né en 1955, il a fait l’essentiel de sa carrière au Sénégal, au Cameroun, au Burkina et au Mali.

Michel allait achever sa carrière professionnelle au Mali, son dernier pays d’adoption, en assurant la coordination du volet R-D du projet AgroEco (AFD), qui venait de commencer. L’Afrique de l’Ouest et du Centre étaient au cœur de ses préoccupations et de sa vie personnelle. Le Sénégal, le Mali, le Cameroun et le Burkina Faso furent ces pays de cœur et d’esprit où il avait tissé un réseau partenarial et d’amitié dense avec les Africains.

Né en 1955, Michel était déjà un praticien des questions agricoles et de machinisme dans sa Bretagne natale avant de commencer ses études à l’Ina-PG en 1975. De famille paysanne il rappelait souvent les débuts de la motorisation dans son village d’Ille-et-Vilaine avec la création de la CUMA (Coopérative d’utilisation de matériel agricole) où il travaillait comme tractoriste durant les congés scolaires. La fin de ses études d’ingénieur a été consacrée à une formation en machinisme agricole à Antony. Ensuite il rejoint le Mali comme VSN à la direction du machinisme agricole au ministère de l’Agriculture à Bamako. En 1981, il est embauché par l’Irat et affecté au Sénégal à la station de recherche de Bambey puis à St Louis. Affilié au Ceemat, Il développera les travaux en machinisme et en technologie de post-récolte à l’ISRA (Institut sénégalais de recherches agricoles) pendant 11 années et formera plusieurs chercheurs sénégalais dans ces domaines, notamment Alioune Fall, le directeur général de l’ISRA et le président du conseil scientifique du Cirad.

Michel Havard

De 1993 à 1997, il est affecté à Montpellier où il réalisera de nombreuses études pour la FAO et l’AFD en Afrique subsaharienne afin de définir des politiques et des projets en machinisme agricole cohérents avec les besoins des agriculteurs. Il relança à cette période les travaux sur la traction animale et la culture attelée, techniques qu’il défendait toujours. Il renoue avec le terrain en partant, en 1997, à Garoua, au nord du Cameroun dans le cadre du Prasac (Pôle régional de recherche appliquée au développement des systèmes agricoles d'Afrique centrale) pour lequel il animera pendant 6 ans le volet de recherche sur le conseil agricole dans ce pays mais aussi au Tchad et en République centrafricaine. Il rejoint ensuite, pour 5 ans, la direction scientifique de l’Irad (Institut de recherche pour le développement au Cameroun) où il apporta un appui important en vulgarisant les approches de recherche-action, en renforçant les liens avec les universités et en initiant des recherches sur les services agricoles. Affecté au Cirdes (Centre de recherche-développement sur l’élevage en zone humide) à Bobo-Dioulasso en 2011, il va jouer un rôle clé dans l’animation du dP (dispositif de Partenariat)-ASAP tout en continuant à travailler dans ses domaines de recherche. Il réalisera plusieurs études sur l’intérêt et les limites de la motorisation en Afrique de l’Ouest, en particulier au Bénin, au Sénégal, au Togo. Toujours modeste et à l’écoute, mais remarquablement efficace il avait mis en place un réseau de chercheurs et de praticiens dans ce secteur d’activités. Durant la même période, il a appuyé l’IER (Institut d’économie rurale) au Mali pour la coordination du volet R-D du projet PASE (Projet d’appui au secteur de l'électricité au Sénégal, financé par l’AFD) en zone cotonnière du Mali en faisant la navette entre Bobo-Dioulasso et Bamako où il fut affecté en avril 2019.

Michel Havard était un pilier de notre partenariat dans ces pays africains. Il ne ménageait jamais sa peine pour rendre service aux responsables des SNRA, aux chercheurs africains et à tous ses collègues du Cirad mais aussi aux plus modestes comme les techniciens et les chauffeurs. Pragmatique, grand connaisseur de l’Afrique subsaharienne il apportait toujours les bons conseils et savait donner du sens à nos activités sur ce continent. Ouvert d’esprit et fidèle en amitié, Michel avait toujours une anecdote, un bon mot sur sa campagne bretonne et ses différentes affectations africaines où il noua de nombreuses amitiés avec ses collègues. Homme de courage et de conviction il a été capable, quelles que soient les circonstances, de maintenir la présence active du Cirad sur les terrains les plus difficiles en portant haut et fort nos valeurs du partenariat.

La recherche et l'agriculture africaines ont perdu un grand serviteur et nous, ses collègues, un ami. Michel était modeste mais avait toujours une vision juste des choses et surtout du partenariat. Il apportait son appui à tous, sans compter ses heures de travail, en relisant publications et synthèses et en soutenant de nombreux étudiants africains qui ont pu réussir grâce à lui.

Les agricultures africaines, la recherche agronomique en général, et le Cirad en particulier, lui doivent beaucoup et sa disparition laisse un grand vide. Michel, c’est le Cirad et ses valeurs incarnés dans un seul homme. Sa disparition est une perte immense pour la coopération scientifique entre la France et l’Afrique. Il avait décidé de prendre sa retraite au Mali où il disait être chez lui. Dans ces moments difficiles et douloureux, nous avons dans tous une pensée amicale et solidaire pour son épouse Djenaba, sa fille Laure et sa famille en Bretagne.


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