Sous l’égide de l’Adac et de l’AIDA, Christian Seignobos, géographe et directeur de recherche émérite de l’IRD, nous a donné une conférence intitulée Une histoire récente du lac Tchad, le 16 novembre 2019, à l’amphithéâtre Jacques Alliot du Cirad. C’est un terrain qu’il connait bien puisqu’il y a consacré l’essentiel de sa carrière. Son expertise est reconnue et il est souvent sollicité par les médias pour donner son analyse des violences qui frappent cette région du monde où prospère la secte islamiste Boko Haram.
L’actualité de la conférence et la notoriété du conférencier ont attiré une assistance nombreuse venue du Cirad et de l’IRD, actifs ou retraités.
Une des originalités de la présentation était qu’elle a été illustrée par de remarquables dessins car, en plus d’un talent d’orateur, Christian Seignobos a aussi celui de dessinateur. Les contextes géographique, historique, ethnique posés, nous avons découvert les étonnantes particularités des activités économiques du lac Tchad où la pêche et l’élevage tiennent une large place. Une organisation sociale inventive exploite depuis des siècles un environnement mouvant, complexe et difficile qui est toujours resté en marge des pouvoirs centralisés dont le pouvoir colonial. Dans les années 2000, le mouvement Boko Haram émergeant du milieu urbain de Maïduguri, capitale de l’Etat de Borno au Nigeria, a diffusé dans le bassin tchadien qui en était proche. Il s’y est enraciné dans les populations autochtones locales kanuri ou buduma. Celles-ci, dépossédées de leurs droits territoriaux ancestraux par une emprise haoussa excessive, vivent mal de devenir minoritaires. Elles ont vu dans le mouvement Boko Haram le moyen d’affirmer leur identité légitimée par leur appartenance au royaume du Kanem qui a été le premier à introduire l’islam en Afrique sahélienne. Le mouvement Boko Haram s’ancre donc dans le passé et est un révélateur de vieilles tensions communautaires. Il permet aux ancestrales populations du lac Tchad de reprendre en main leur destin en échappant à un contrôle étatique jugé corrompu et vendu à l’occident. En terminant sa conférence, Christian Seignobos s’est montré pessimiste sur un proche retour à une situation normalisée.
De nombreuses questions au conférencier ont suivi témoignant de l’intérêt des auditeurs. Avant de libérer ce dernier, nous avons été nombreux à acheter son dernier et remarquable ouvrage Des mondes oubliés – Carnets d’Afrique en ayant droit, chacun, à une dédicace illustrée de sa main.
Jacques Chantereau
Commentaires
En rédigeant mes mémoirs du Nord du Cameroun 1969-1971, je suis tombé sur les oeuvres online de Monsieur SEIGNOBOS et voudrais le remercier. Puis je voudrais savoir s'il serait possible de le rencontrer. En tout cas, je souhaiterais que l'on rajoute mes coordonnées à la liste pour ses prochaines conférences.
Bien cordialement,
Constance Konold (Peace Corps teacher, Pitoa)
+33 6 7330 9305